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G178 de Générik Vapeur et Xarxa Theatre

jeudi 21 juillet 2011 , par Holly Webley-Naylor (Traduction  Mathilde Vautier)

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Après une journée passée sous une chaleur accablante, alors que l’on a dévoré des spectacles à la chaîne, l’heure de minuit a attiré une foule comateuse sur la place de l’Hôtel de Ville de Sotteville-lès-Rouen.

Mais les yeux fatigués et les corps réclamant le lit se sont vite réveillés à la vue d’un homme descendant un immeuble de vingt étages, marchant à la verticale. Tous les yeux sont rivés vers le ciel lorsqu’un bateau sort du balcon de l’appartement du dernier étage dans un nuage de fumée rouge, se dressant au dessus des têtes des spectateurs puis s’écrasant au milieu de la place. Dans un tourbillon de tambours, de guitares électriques, de feu et de pyrotechnie, Générik Vapeur et Xarxa theatre ont entraîné la foule dans une déambulation sur l’histoire de l’avidité humaine, la corruption et la violence, la dénonciation virulente de la guerre, du consumérisme et de l’industrialisation, injectant ainsi au public comme une piqure d’adrénaline dans sa sensibilité.

Menée à travers l’obscurité par des flammes vertes et rouges, la foule, presque galopante, suit un cortège évoquant des images universelles et familières de ravage et de dévastation.

L’une après l’autre, ces installations mobiles propulsent le public dans la rue. Partout où l’on regarde, il se passe quelque chose de terrifiant : des grilles brûlantes poussées par des hommes en sueur, hilares, chargeant contre leurs victimes affamées ; la femme au regard triste perchée sur une pile de valises, le regard perdu dans la foule ; de grotesques girondes, prenant un bain dans des toilettes géantes...

Après une allusion directe à Guantánamo Bay, avec cette ligne de production vêtue de bleus-de-travail oranges déplaçant des valises - comme les rouages d’une machine -, les compagnies montent sur des caddies géants et jettent sur une foule ironiquement affamée et demandeuse le contenu de boîtes de cornflakes.
C’est la pagaille, une fusion exaltante d’excitation et de terreur, on se lance des poignées de cornflakes, certains applaudissent, d’autres sont visiblement perturbés par l’univers nihiliste qui se déploie sous leurs yeux.

Dans un final électrifiant, où des signes de l’Euro sont brûlés et des troupeaux à moitié massacrés chargent dans le tas, le spectacle culmine par un duel entre les deux chefs avides sur leurs caddies, qui, dans une frénésie de peinture et de plumes, luttent avec acharnement pour le titre du consumériste ultime. Une dernière détonation puis un coup de feu tire sur une douzaine de figurines de soldats perchées sur le toit de l’Intermarché devant lequel le public se trouve à présent, puis nous arrose d’une pluie d’or de manière désastreuse et magnifique. La foule est stupéfaite. L’inquiétant silence qui suit est le témoin de la réflexion que le spectacle provoque : une mise en garde apocalyptique qui nous a forcé à ouvrir les yeux sur notre propre désensibilisation.

Photos et textes : Holly Webley-Naylor et Josh Bridges

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